Analyse de gestion d'une course d'endurance, ou comment éviter d'exploser en plein vol.
"Le holeshot c'est la victoire" ... oui, mais non. Pas en endurance en tous cas!
Je démarre l'écriture de cet article en visionnant le live du départ du 6h Winter Endurance (par Aristide, FB Aroo ocr Crew), sur lequel certains coureurs semblent déjà bien essoufflés sur la première boucle de positionnement, il reste 6h de course à ce moment là...
Afin de mesurer la perte de vitesse au fil du temps de course, les temps de chaque boucles des 42 finishers ont été analysés suivant le protocole suivant: différence de vitesse entre la moyenne des trois premiers tours et la moyenne des trois derniers. Le résultat est un pourcentage de variation par rapport à la vitesse de départ (trois premiers tours, hors boucle de positionnement).
Voici les résultats condensés sous forme de tableau:
Diminution vitesse | <5% | 5% - 20% | >20% |
Coureurs | 2 | 7 | 33 |
Femmes (9) | 2 | 3 | 4 |
Hommes (33) | 0 | 4 | 29 |
La théorie:
Je vous invite à aller lire l'excellant article de Bruno Heubi, qui fait le tour de la question et donne toutes les clefs pour réussir en endurance.
Les données issues de la littérature et des retours d'expérience d'athlètes de tous niveaux sont sans appel, il faut partir à l'allure cible. Et c'est valable du 5km au 100km!
Donc ici sur une épreuve dont la durée était comprise entre 6h et 6h30, il semblait sage d'adopter dès le départ, y compris et surtout sur la boucle de positionnement (route), une allure plus lente que notre allure marathon. De là une allure comprise entre 5' et 5'15/km semblait adaptée à la tête de course...
Analyse:
On a retenu 5% comme première limite de catégorie, ce qui à titre d'exemple ferait déjà passer un coureur marathon d'une allure de 5'/km à 5'15/km en fin de course. En réalité, les deux athlètes entrant dans cette catégorie ont des variations respectives de 0% et 1%. Cette catégorie comporte donc des athlètes ayant parfaitement su gérer leur allure.
Une seconde catégorie regroupe les coureurs ayant "minimisé les dégâts", avec une perte de vitesse maximale de 20%. Appliqué à un pace marathon, ça équivaut à passer de 5'/km à 6'/km sur les 10 derniers km. Pourrait on dans ce cas considérer avoir couru à la bonne vitesse au début?
Le dernière catégorie comporte les coureurs ayant davantage "subit" la course.
Bien sûr s'agissant de course à obstacles, d'autre paramètres entrent en compte : échecs plus fréquents et tentatives multiples aux obstacles, blessures, mais sont tout autant à intégrer à la gestion de course dès le départ.
Bilan:
La majorité des coureurs de cette épreuve a une grande marge de progression, sans forcément s'entrainer davantage, mais simplement en démarrant plus lentement. C'est contre intuitif, et pourtant...
Les femmes semblent naturellement plus disposées à une gestion prudente, et donc mieux armées pour ce type d'épreuve. Les résultats en ultra trail mettent d'ailleurs en évidence un pourcentage de finisher plus important chez les femmes que chez les hommes.
Pour les coureurs envisageant un Ultra (Morzine, trail...), accordez la plus grande importance à votre allure de départ.
Arriver en zone de transition sur un Ultra (Andorre et Morzine pour mon cas) et sentir qu'on a les ressources pour accélérer sur la deuxième boucle a quelque chose de grisant (c'est aussi à ce moment qu'on se rend compte que la majorité des coureurs qu'on double, partis fort, termineront leur course dans la souffrance).
La même gestion nous avait offert une victoire sur un 24h en Belgique en duo.
"On ne gagne pas un Ultra, ce sont les autres qui le perde".
Ne faites pas LA course, faites VOTRE course.
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